mercredi 23 novembre 2011

"Pour en finir avec le cinéma" de Blutch (Dargaud)

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Je ne reviens pas sur la bibliographie du bonhomme, le sacre qu'il a eu en devenant président du jury du festival d'Angoulême en 2010 et sur sa carrière mais, sauf le respect qu'à priori je lui dois, je n'accrocherai jamais à l'univers de Blutch.

Son dernier album Pour en finir avec le cinéma aurait pu me réconcilier avec lui, non pas par son style mais par son choix de l'ancrer au cinéma. Et là au mon dieu ! Suis-je une béotienne du cinéma ? Ou ne suis-je pas dans cette catégorie d'intellos qui trouvent génial une oeuvre qui a été encensée par des personnes bien pensantes ?
Je suis l'une ou l'autre voire les deux car ces saynètes à la gloire ou non gloire du cinéma m'ont endormies juste après m'être demandé "C'est qui déjà celui qui jouait Tarzan ?" ou "Elle est dans un film cette danseuse ?" et "Quel film j'ai vu dernièrement ?"

Finalement je crois que c'est une BD générationnelle dans laquelle je ne me retrouve pas et dont le dessin ne me plaît toujours pas... Comme on dit "y'a qu'les cons qui ne change pas d'avis !", j'aurais essayé mais je vais rester conne encore un moment.

samedi 12 novembre 2011

"Le Roi sans fou" d'Adrien Cachinho (Manolosanctis)

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C'est l'histoire d'un roi sans divertissement (elle est facile mais Adrien Cachinho a dû y penser) après la mort tragique de son bouffon, superstar en son royaume. Il missionne donc, tout naturellement, le héros local pour la quête d'un nouveau roi du divertissement. Sa fille, grande adolescente fan de rock qui s'ennuie autant que lui, s'impose au héros pour partir à la recherche du prochain comique royal.

Bon, on se doute que la fille va être un boulet pour le héros barbare qui a plus l'habitude de tuer du mécréant que d'aller à la recherche d'un bouffon dans une contrée lointaine très moderne où il va rencontrer autant de fous que de comiques moyennement drôles (toute ressemblance avec des personnages réels ne serait pas fortuite). On se doute d'autres choses mais je n'en dirai pas plus.
Le graphisme sert bien l'histoire, la dynamique est bonne et cet album prouve qu'on peut trouver des BD humoristiques en un seul tome !

Si vous êtes à la quête d'un divertissement sympathique n'hésitez pas à lire Le Roi sans fou.

Conseillé dès 14 ans - One shot

Rêve, d'ailleurs

Je m’envole et je voyage
vers de nouveaux paysages,

Où la cloche du glacier fait écho
sur les banquises des esquimaux,

Où le voilage de la mariée
met à mal l’équipage d’un voilier,

Où les rues de Katmandou sont envahies
de hiboux ne pouvant attendre la nuit
pour s’enivrer de curry,

Où les visages illuminés par la générosité
chantent le bonheur de la sérénité,

Où les claquements de doigts
des bluesmen de la Louisiane
rythment les battements du cœur,

Où l’odeur du soleil, crépitant comme du beurre,
nous appelle, nous attire, nous ballade…
Et là c’est la dégringolade !

Je tombe à pic et c’est le hic
- Réveil en fanfare –
Je ne voulais pas d’échappatoire
à ce rêve d’ailleurs.

Assaisonnement

Je suis d’une génération
qui a vu quatre saisons.

Je suis d’une génération
qui se dégénère au fil des raisons
et du lunatisme de mère nature,
accentué par notre égoïsme pur.

Je suis d’une génération
qui, prise dans l’oscillation
entre passion, dépression,
anticyclone et raison,
            - Tournicoti, tournicotons -
en ressort angoissée et écœurée
- Plus de repères -
Le passé est science-fiction ;
Le futur ne peut se penser...
L’anticiper donne envie de…

La pensée de la mort
je l'ai toujours évitée. 
Trop jeune pour me protéger.
Et de toutes façons,
quand j'aurai vieilli,
un savant aura été pris
d'assez de folie
pour trouver une solution 
à l'éternité !
- Mon rêve s'enfuit -

On ne doit pas l'aimer
celle qui nous a nourris
pour avoir trouvé la solution
de son extermination...
Et de la nôtre, par la même occasion !

Je suis de cette génération
que la terre reprendra
pour de mauvaises raisons :
un rapt de ses ravisseurs,
de ses destructeurs.
            - Un pied de nez à l’arrogance -
Après leur grande bouffe d’énergie,
le profit à outrance,
un ordre se rétablit, 
et pas dans les meilleures conditions.

Ce qui arrive est, en partie, naturel,
je ne pousse pas le bouchon,
Mais ce qui advient est humain.
- Effondrement de Babel -
Cette terre nous a construits et élevés, 
on a trop voulu la défier, la surpasser.
Langues, coutumes et souvenirs s’effacent
au profit de nouveaux codes et nouvelles règles qui se tracent.

Je suis de cette génération
qui doit réapprendre à vivre
et penser à survivre,
qui hésite à faire un petit
pour ne pas calquer des valeurs à inculquer
sur un monde dénaturé, dévalué,
pour ne pas avoir à être témoin avec bébé
des cancres qui nous entoureront
et n’auront pas appris la leçon.
Ils tenteront des constructions,
entre les planètes, de ponts.
Cons pour cons autant l’être jusqu’après l’horizon,
Pluton, Orion et autres terrains d’expansion.

Je suis de cette génération
Qui récupère les défauts de fabrication
Et qui essaie, pourtant, de croire à une amélioration.
Je suis de cette génération
qui ne se remet en question
qu’au fil de deux saisons.

vendredi 4 novembre 2011

3" [Trois secondes] de Marc-Antoine Mathieu (Delcourt)

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Trois secondes c'est le temps qu'il faut à la lumière pour parcourir 900'000 km mais c'est aussi le temps d'une explosion, d'un SMS ou d'un tir dans ce dernier album de Marc-Antoine Mathieu.

Trois secondes ce n'est pas le temps qu'il vous faudra pour apprécier ce livre sans texte et pourtant plein de sens nous transportant d'un point de vue à un autre par jeux de zoom, de lumière, de reflet et de clair obscur au fil des cases en noir et blanc pleines de suspense.
On avance dans cette histoire tel un astronaute en apesanteur dans un temps suspendu, puis on sent au fil des pages que notre œil est celui d'une caméra qui voit tout et peut tout voir à 360° et plus encore...
C'est troublant, c'est prenant, c'est intriguant... Il me faudra d'ailleurs une deuxième lecture pour démêler le scandale au cœur du livre.

"Polar" haletant et surprenant A acheter, emprunter ou offrir les yeux fermés.

Conseillé dès 14 ans - One shot

Recherche du temps avenir

Il n’y a personne sur le chemin de la scène alerte,
le jour se penche au dessus de l’octogénaire
et la gelée aveugle avance d’un seul pas de géant
alors qu’un sale gamin respire une haleine noire.

Il troque un éclair à quatre pattes
contre la suffocation de la lumière
qui n’est plus à craindre –
l’esprit est plus fort et sombre que tout.

Il ira cueillir comme il faut des narcisses du rêve
pour se souvenir de la pureté du coq.
Le temps ne fera que passer sur le plafond de la mort.

jeudi 3 novembre 2011

Vers dans la pomme

Donne-moi les lacets de soie de tes chaussures
qui, fermant mes paupières, créeront mon armure.

Une petite mort me plongeant dans un profond sommeil,
me poussant à l’effort d’oublier la rue des émois.

J’y vois cet enfant devant faire
un choix crucial-fiction : l’avenir !
– à gauche ? à droite ? –

Redevenir poussière à gauche
et recommencer une vie adroite
dans cette pomme new-yorkaise.

Mélodie en Do minée

Elle l’a idolâtrée, gamine, la famille adorée
dans laquelle sa place au soleil l’attendait
avec le papa rock’n’roll, roi de la galette, 
la maman de la soul, reine de la scène,
le frère de la pop, prince de la vague,
ou, encore, le papy icône des transistors.

Elle a confié son âme - docile et naïve -
au tonton marchand de rêve lui offrant
un trône molletonné à la table familiale.
Respirant la bienveillance affamée de dollars,
il l’a façonnée en lettres dorées pour papier glacé
et la voilà placée au milieu de l’escalier vers le paradis,
voilée d’idéaux.

Chanter – les ondes – sollicitée – répondre – adorée – le monde – jouer – solo – enquiller – scène à partager – cachets à avaler – amis à éviter – mots à dégobiller – images à monnayer – comptes à solder – regrets à enregistrer.

Tonton profite, bénéficie, réinjecte et éjecte
au grès des tempos qui passent.
Après l’avoir pressée, elle se lasse et se fane
mais résiste.
Qu’importe, il change de disque.
Descente aux enfers dans la camisole tricotée
au fil des contrats qu’elle a signés.
Maintenant seule, à qui demandera-t-elle asile ?